Georges Giraudon : un poilu Chevalier de la Légion d’honneur.

Le 25 septembre 1887 nait Georges Antonin Giraudon dans le bourg de Giroux, un village de l’Indre. Il est le fils aîné d’Alexis Giraudon maréchal ferrant, et de son épouse Marie Julie Guillemain. Deux ans plus tard, Alexis Giraudon déclare à la mairie la naissance de Charlotte, la petite sœur de Georges. Le petit garçon châtain aux yeux bleus grandit à Giroux, où ses parents tiennent une épicerie en plus du travail de maréchal ferrant. Quelques années plus tard, il devient instituteur, possède le permis de conduire et en août 1908, il obtient son Brevet d’Aptitude Militaire.

A l’automne suivant, c’est donc un jeune homme instruit qui est incorporé comme soldat de 2ème classe au 90e Régiment d’Infanterie basé à Châteauroux. En quelques mois Georges Giraudon devient caporal puis sergent. Il suit des cours et au printemps 1910, il est promu sous-lieutenant de réserve. L’instituteur continue d’exercer son métier dans les villages de l’Indre jusqu’à la mobilisation générale le 2 août 1914.
A la mobilisation chaque régiment crée un régiment de réserve, Georges Giraudon est affecté à celui du 68e nommé le 268e Régiment d’Infanterie (268e R.I.), appartenant au 9e corps d’armée. Ce régiment a un effectif de 32 officiers, 2202 hommes de troupe, 139 chevaux, 13 voitures à 4 roues et 25 à 2 roues, réparti en 2 bataillons de chacun 4 Compagnies.
Le régiment quitte Le Blanc le 9 août par chemin de fer et emprunte la ligne de transport D (Tours, Les Aubrais, Montargis, Chaumont) jusqu’à la gare de régulation à Bricon où il est dirigé près de la frontière en Lorraine dans les villages de Frouard et Pompey où il cantonne. Le 268e R.I. est essentiellement occupé à organiser la défense pour maintenir l’ennemi au-delà de la Seille jusqu’à la fin août, puis c’est le départ pour la Champagne.

Au cours de cette guerre, Georges Giraudon est blessé 3 fois, il alterne les périodes au front en Lorraine, Champagne, Flandres, les séjours à l’hôpital pour maladie et soigner ses blessures, des stages de formation.
Voici quelques extraits de sa vie durant cette période :

Le 7 octobre 1914 à 11h00 le régiment reçoit l’ordre de se rendre à Mourmelon-le-Petit et l’ordre de bataille est modifié, Georges Giraudon devient lieutenant de la 24e Compagnie du 6e Bataillon. Avec le 290e Régiment d’Infanterie, le 268e R.I. est chargé d’assurer la défense d’un secteur sur la commune de Baconnes. Le 9 octobre à 16 h15, le 5e et le 6e Bataillon se mettent en marche pour occuper les tranchées. Pendant cette relève les Allemands tentent une attaque et une fusillade nourrie éclate. Les soldats du 268e n’ont pas eu à intervenir, la tranchée de 1ère ligne étant encore occupée par le 290e mais la relève ne se termine qu’à 22 h. Le lendemain, les hommes renforcent les tranchées et améliorent les ouvrages de défense sous le feu de l’artillerie ennemie. 3 soldats sont blessés, venant s’ajouter aux 2 de la veille. Au bout de 3 jours, le 290e relève les bataillons. Le 6e est ensuite employé à creuser des tranchées en arrière de celles existantes pour établir une ligne de résistance, ou à faire des exercices, et le 15 octobre il remplace le 290e. Cette fois Georges Giraudon se retrouve dans les tranchées de 2e ligne. Les relèves se succèdent tous les 3 jours jusqu’au départ du 268e pour Ypres dans les Flandres.

Depuis la mi-octobre 1914, Britanniques, Belges et Français défendent Ypres pour se protéger d’une attaque allemande vers la mer du Nord. Les combats vont durer quatre ans et la ville sera complètement détruite.
Le 24 octobre, l’ordre est donné au 6e Bataillon de se diriger vers Saint-Julien au Nord d’Ypres pour être à la disposition du Lieutenant Colonel commandant le 68e R.I.. Le 6e bataillon progresse sur Wallemolen et à la nuit trois compagnies sont en première ligne, l’autre en deuxième. Le 6e Bataillon atteint le ruisseau de Strombeck et repasse sous les ordres du 268e. Le 5e bataillon est en 2ème ligne. A la nuit, les troupes sont installées dans les tranchées pour se garantir du tir ennemi.
Le 25 octobre à 7h00, une vigoureuse offensive est menée par le 6e bataillon dans la direction de Passchendaele en liaison avec le 68e . Le 6e Bataillon se trouve débordé sur sa gauche, l’artillerie prévenue du mouvement offensif ennemi, le 268e et le 68e stoppent l’offensive. Le 125e se porte en avant pour aider le 6e bataillon à se dégager. Dans la journée, le 6e bataillon continue sa marche en avant et franchit le ruisseau Strombeck en faisant 11 prisonniers. Au cours de ces combats, le lieutenant Giraudon est blessé à la face par un éclat d’obus. Pour cette journée, on dénombre 7 tués, 19 disparus et 59 blessés dans le journal des marches et opérations.

En mars 1915, Georges Giraudon passe au 409e Régiment d’infanterie. Ce régiment, crée provisoirement, est constitué de deux bataillons d’hommes venus des dépôts de la 9e région militaire. Il s’agit soit des blessés guéris, soit des soldats de la classe 1915 basés à Chinon. Un 3ème bataillon basé à Azay-le-Rideau est composé d’hommes des régions envahies du Nord. Environ 3000 hommes entraînés partent au front le 7 mai. Après avoir combattu dans la Somme jusqu’à la fin du mois de février 1916, le 409e cantonne à Haudainville à 5 kms au sud de Verdun. Les trois bataillons sont logés dans les péniches du canal de l’Est où les avions ennemis viennent fréquemment lâcher des bombes, pendant qu’au nord de Verdun, la canonnade fait rage. Le lieutenant Giraudon commande la 2e Compagnie du 1er Bataillon dirigé par le Commandant de Lattre engagé dans les combats au nord-est de Verdun pour défendre le fort de Vaux.


Le 1er mars, le 1er Bataillon part en reconnaissance au sud-ouest de Vaux avec la 1ére Compagnie de Mitrailleuses du Régiment et effectue la relève du 60e R.I.. Les 2e et 3e Bataillons sont envoyés en avant du fort pour défendre l’ouvrage d’Hardaumont : deux abris en béton d’une capacité de 144 places permettant d’empêcher un assaut d’infanterie ennemie. A partir du 7 mars, le fort commence à être systématiquement bombardé et les attaques se succèdent. Les Allemands reprennent l’ouvrage d’Hardaumont. Quelques heures plus tard, les deux bataillons du 409e le conquièrent avec des pertes légères, la 9e Compagnie reste pour occuper la position. Les bombardements s’intensifient dans la journée jusqu’à 30 coups à la minute. Hardaumont est canonné et les pertes sont sérieuses. En fin d’après-midi, le village de Vaux est la proie des flammes.
Les tirs s’arrêtent vers 2h00 du matin pour reprendre à l’aube du 8 mars. Les bombardements par obus de gros calibres sont de plus en plus intenses de 45 à 60 coups à la minute. Hardaumont est de nouveau violemment attaqué de trois cotés. La garnison décimée évacue l’ouvrage. Des mitrailleuses allemandes sont installées et commencent à arroser le village. En fin d’après-midi, l’ennemi pousse une vive attaque qui à peine déclenchée est contre-attaquée par les deux compagnies du bataillon de Lattre. Chargeant à la baïonnette, le chef de bataillon en tête avec les deux commandants de compagnies sont tués, les Allemands reculent et les compagnies tiennent les positions.
Il n’y a plus de réserves, des renforts sont demandés car deux compagnies ennemies se sont infiltrées dans le village de Vaux. Le 409e a beaucoup souffert dans cette journée et n’existe plus guère au sens tactique. Le 9 mars, l’ennemi attaque à plusieurs reprises le fort de Vaux, mais les mitrailleuses lui causent de terribles pertes, et le contraignent d’abandonner les pentes nord du fort. Dans la nuit du 9 au 10, le 409e est relevé par le 158e R. I.
Le 409e est rassemblé au tunnel de Tavannes où il commence à se réorganiser. Les hommes sont exténués. Lors de l’appel 28 officiers et 1140 hommes de troupes sont présents. Parmi les nombreux blessés, Georges Giraudon a reçu un éclat de balle au nez. Le Lieutenant Colonel Commandant le 409e Régiment d’Infanterie cite à l’ordre du régiment 75 militaires dont le lieutenant Giraudon. A l’issue de ces violents combats, le fort est soumis à un siège qui s’achève le 1er juin 1916. Lorsque les Allemands l’atteignent, la garnison, sans soutien extérieur, est vaincue après une semaine de combats héroïques à l’intérieur du fort.

Georges Giraudon, promu capitaine, est blessé une troisième fois le 1er novembre 1918, lors de combats à Banogne dans les Ardennes. Il est cité à l’ordre pour sa ténacité et pour avoir conservé le commandement de sa compagnie malgré sa blessure. Le 17 juillet 1919, il est démobilisé et rentre à Issoudun auprès de son épouse Jeanne Gourrier. Maintenu dans la réserve au 90e Régiment d’Infanterie, il reprend son métier d’instituteur à Pouligny-Saint-Pierre puis à Montgivray.

1er novembre 1918-Extrait du J.M.O du 409e R.I.-Archives historiques du S.H.D de Vincennes-Cote 26 N 768/15

En février 1923, Georges Giraudon est proposé à la nomination dans l’Ordre de la Légion d’honneur par le ministre de la guerre. Il est nommé Chevalier par décret le 24 mars et sa décoration lui est remise en mai. Mais un mois plus tard, l’instituteur écrit au Général à Poitiers qu’il refuse d’ acquitter la somme de 59 Frs pour une décoration qu’il n’a pas demandé, il souhaite que les combattants aient droit à la gratuité du brevet et il rend son insigne. Sept ans plus tard, il écrit au Grand Chancelier pour demander que lui soit adressé son brevet en s’acquittant des droits par prélèvement sur son prochain traitement. Georges Giraudon portera dans les grandes occasions le discret ruban rouge sur le revers gauche de son costume civil.

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Un avis sur « Georges Giraudon : un poilu Chevalier de la Légion d’honneur. »

  1. bravo pour avoir trouvé ce doc. Mon grand père n’a jamais évoqué la guerre et j’ai pense qu’il devait etre dans les etats majors pour avoir survécu. Ce doc prouve qu’il n’en est rien. Il m’avait seulement donné le livre de G Blond « Verdun » où il corrige l’auteur qui avait mis le 401 au lieu du 409e. Merci pour ce travail de mémoire que je transmet à mes frères

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