A qui appartient la voiture devant laquelle pose le petit François B.?
Ce petit garçon semble très fier de poser sur le marchepied de cette voiture immatriculée 4097-KQ.
Pour savoir quel était son propriétaire, il faut commencer par expliquer l’histoire des plaques d’immatriculation françaises. En 1901, un nouveau décret est publié au « Journal officiel ». Dans le but de mieux repérer les véhicules en fuite après une infraction, la taille des plaques d’immatriculation est normalisée et il est instauré une lettre pour chaque arrondissement minéralogique, précédée d’un numéro de 1 à 4 chiffres. Par exemple, la lettre L comme Le Mans, regroupe les départements de la Sarthe, la Mayenne, la Loire-Inférieure, la Bretagne puis à partir de 1919 : le Maine-et-Loire, la Vendée et les Deux-Sèvres. De nouvelles lettres sont ajoutées à partir de 1904, comme le O à Nancy ou le V à Marseille. C’est l’ingénieur en chef des Mines de l’arrondissement qui consigne dans un registre les immatriculations avec les caractéristiques du véhicule.
Ce système de numérotation devient compliqué et inadapté face au nombre croissant de véhicule à immatriculer.
À partir d’octobre 1928, chaque département possède son groupe de 2 lettres, une circulaire du 30/04/1928 présente un tableau de trois pages avec toutes les combinaisons de lettres pour chaque département. Cette nouvelle méthode de numérotation a été adoptée jusqu’en 1950 ; par la suite, les numéros de département ont pris le relais : 1 à 4 chiffres suivis d’1 à 3 lettres suivis du numéro de département. Depuis 2009, la plaque commence et se termine par une ou deux lettres, et un groupe de chiffres entre.
Avec ces informations, nous pouvons établir le département d’origine de la voiture. Le véhicule recherché a une plaque d’immatriculation terminant par KQ, il correspond aux véhicules immatriculés en Haute-Marne entre 1928 et 1950.
Les archives départementales conservent les registres d’immatriculation émis par la préfecture et quelques fois ceux transmis par le service des Mines. Ils sont classés par numéros d’immatriculation, le registre coté 542 W, KQ 3981 à 6010 contient l’historique du véhicule recherché.

Le véhicule 4097 (KQ) est une Citroën A C4, le N° dans la série du type (96016) est gravé sur une plaque précédée de l’identification du type et le nom du constructeur, celle-ci est fixée au châssis. Le principe est le même pour le N° du moteur.
Le véhicule a été modifié en 1946 car il a été réceptionné par le service des Mines, le genre de véhicule est passé d’utilitaire à commerciale.
Le premier acquéreur est Georges Maillard en février 1930. Âgé de quarante ans, il est mécanicien et réside à Bourbonne-les-Bains.

Sur la page de droite du registre, sont inscrits les propriétaires suivants.
C’est la 19 mai 1932 qu’Ernest Tresse rachète le véhicule à Georges Maillard. Ernest Tresse est un jeune boulanger de 28 ans qui vit à Damrémont. Il garde la voiture trois ans et la revend à René Poupas, célibataire, bouilleur de cru à Marault.
Celui-ci contracte un emprunt et la voiture est gagée au bénéfice du prêteur jusqu’au remboursement de l’emprunt. Pendant ce temps le propriétaire est empêché de vendre sa voiture, il reçoit un récépissé de gage, ici le N°46. La radiation du gage a lieu après le paiement de la dette, René Poupas a remboursé son prêteur en mars 1936.
Instaurée par la loi du 29 décembre 1934, cette option permet d’acheter un véhicule à crédit, visant à faciliter l’acquisition de voitures ou de tracteurs grâce à une garantie fournie au prêteur, d’où la nécessité de demander un certificat de non-gage avant d’acquérir un véhicule.
En juillet 1946, le dernier acheteur de la Citroën AC4 est Robert Decroix. Il réside à Saint-Dizier et il est fabricant d’objet tranchant. Cette année-là, le petit François B. a trois ans, il est le petit-fils de Robert Decroix. Son grand-père et sa famille ont fait le déplacement dans le Loiret à l’occasion du baptême de la dernière petite-fille, Catherine. C’est certainement la première fois que François voit la voiture de son grand-père, et il semble être ravi de cette acquisition.
Dix ans plus tard, Robert Decroix a changé de voiture, il a acheté une 2 CV. C’est un autre petit-fils, Bertrand, qui pose fièrement devant la fourgonnette. Une autre histoire, une autre généalogie de véhicule…

Si vous possédez des photos de véhicules anciens, n’hésitez pas à solliciter mes services.
Je suis à votre disposition pour vous aider dans vos recherches : Historique d’un véhicule
Sources :
Archives départementales de la Haute-Marne : https://haute-marne.fr/archives-departementales/archives-en-ligne/
-Registres des immatriculations de véhicules automobiles : 542 W
-Recensements :
Bourbonne-Les-Bains : 1931 158 M 60/17
Danrémont : 1931 158 M 164/19
Marault : 1936 158 M 309/20 ; 1946 158 M 309/21
Saint-Dizier : 1936 158 M 448/19 ; 1946 : lacunaire
https://gallica.bnf.fr/
https://www.retronews.fr/
https://fr.wikipedia.org/
https://www.citroenorigins.fr/fr/vehicule/2cv
Jean-Louis Decrand et Guy Buard, membres des Chevrons du Bocage des Coëvrons en Mayenne https://www.facebook.com/groups/leschevronsdubocagedescoevrons/