
En 1860, le couple César Culot et Virginie Daubercies achète une maison et des pâturages au lieu dit Saint-Gorgon de la commune d’Anor dans le Nord (parcelles 1,2 et 3 du plan cadastral d’Anor de 1823). L’année suivante naît un fils qu’il prénomme Cézar, ce sera leur unique enfant.

A vingt ans Cézar Culot, employé de commerce, se présente pour le recensement militaire, il est de la classe 1881. Depuis 1818, le recrutement militaire se fait par engagement et tirage au sort. Le conseil de révision consiste à évaluer le conscrit physiquement et intellectuellement. A partir de 1867 une fiche de matricule est établie, regroupant les informations collectées comme le signalement : Cézar a les cheveux châtains et mesure 1 mètre et 68 centimètres. Ensuite la fiche sert à inscrire la carrière militaire des conscrits.
La procédure de tirage au sort permet d’affecter à chaque conscrit un numéro. La liste ordonnée de ces numéros sert à appeler les jeunes au service militaire en fonction des besoins de l’armée, les numéros les plus faibles étant appelés les premiers. Cézar est « bon pour le service » ce qui est important dans sa vie future pour ne pas être suspecté de mauvaise santé. Mais il tire le numéro 12, il est dans la première partie de la liste de recrutement. Pour échapper à l’appel, il peut se faire remplacer. Le remplaçant négocie avec l’appelé et sa famille une compensation financière en échange de son engagement. Ce ne sera pas le choix de Cézar et sa famille.
A la fin de l’année 1882, Cézar Culot part pour Cherbourg dans l’Infanterie de Marine. Il devient rapidement caporal et en mai 1884 il embarque pour Madagascar. Six mois plus tard, suite à la prise du fort d’Ampasibadzin, occupé par les Hovas, Cézar est déclaré disparu. Il faudra attendre le jugement du tribunal civil d’Avesnes du 9 mars 1888 pour officialiser son décès.

Entre temps ses parents ont fait construire une chapelle sur leur terrain au bord de la route qui mène à Fourmies, dédiée à Saint Antoine patron des marins, Notre Dame de la Délivrance et Saint Benoît pour conjurer le mauvais sort. D’une surface d’environ 5 m², elle est faite en brique jointoyée à la chaux. La couverture est constituée d’ardoises de Fumay, violacées, posées sur un voligeage en bois. Les solins servant à l’aménagement des angles de la toiture sont faits en plomb. Une croix surplombe la boule de pierre bleue posée en épi de toiture sur la pointe de façade. Dans la 2ème moitié du XXème siècle, des lambrequins de bois, finement travaillés sont posés au-dessus de la façade devant les ardoises de rive.
La porte d’entrée, en métal peint de couleur claire, est ornée de ferronneries ajourées permettant une ventilation de l’intérieur de la chapelle et un éclairage naturel, ainsi que les deux fenêtres latérales. A l’intérieur de l’édifice, le sol est fait d’un carrelage en damier noir et blanc, les murs sont enduits de chaux blanche. Le retable et l’autel sont en chêne, sur ce dernier sont disposés diverses statuettes religieuses dont celles des saints évoqués précédemment.
César Culot décède en 1896, regrettant certainement de ne pas avoir fait remplacer son fils pour le soustraire à l’incorporation. En 1902, sa veuve vend leur propriété à Amédé Basquin et sa femme Marie Delmaire. Le couple a un fils unique, Camille, qui est appelé en août 1914. L’histoire se répète : quelques semaines plus tard, Camille manque à l’appel. Il faudra plusieurs années pour qu’il soit officiellement déclaré décédé.
Marie Delmaire entretiendra la chapelle de Saint-Benoît jusqu’à son décès en 1949. Restaurée en 1997 par l’association anorienne « Amis des Chapelles », elle appartient aujourd’hui à la commune d’Anor.

Sources :
- Archives départementales du Nord.
- Documents de la famille Basquin-Delmaire.
- Documents personnels de Jean-Jacques Guichard, président le l’association « Amis des Chapelles ».
- Diagnostic du Bâti de la chapelle établi en 2017 par Emmanuel Cazier, chargé de mission Habitat Durable et Patrimoine Bâti au Syndicat Mixte du Parc Naturel régional de l’Avesnois.