
Le lac de Haute Mayenne, d’une superficie d’environ 123 hectares, s’étend sur près de 6 kms sur les communes d’Ambrières-les-Vallées, la Haie-Traversaine, et sur la rive gauche : Saint-Fraimbault-de-Prières et Saint-Loup-du-Gast. Ce lac est alimenté par les eaux de la Mayenne, de la Colmont, de la Varenne et celles des ruisseaux du Pontceau et du Pigray. C’est une retenue d’eau artificielle, en forme de bottine, créée suite à la construction du barrage de Saint-Fraimbault-de-Prières sur la Mayenne. D’une longueur de 210 mètres et d’une hauteur maximum de 15,5 mètres, le barrage a été inauguré le 14 octobre 1978 après 3 années de travaux. Outre la construction du barrage, il a fallu relever les futures berges du lac et aussi démonter plusieurs bâtiments tous situés sur la commune de Saint-Fraimbault-de-Prières dont le moulin de Lisle, l’habitation de la Lavanderie et la ferme de l’Epinay. Six ans après la mise en eaux, une centrale électrique est construite.
Ce lac permet d’avoir une réserve d’eau pour satisfaire les ressources en eau potable en aval et réguler le débit de la Mayenne.
Le moulin de Lisle appartient aux propriétaires du château de L’Isle-du-Gast (aujourd’hui nommé Saint-Georges-de-Lisle), qui surplombe la Mayenne du haut de son rocher, au dessus de l’actuel barrage. Les fermiers viennent y moudre leur grain dont une partie est revendue aux tisserands et autres habitants qui fabriquent leur pain. Le premier bail du moulin retrouvé dans les archives de la Seigneurie de Lisle a été passé par René de Lisle pour Gilles Roullaye en 1567 pour 67 livres par an et d’une durée de 3 ans. René de Lisle meurt la même année sans succession. Ses oncles Jean, René et Paul héritent des terres. René, curé de Saint-Fraimbault décède et Jean rachète les terres de son frère Paul.
Les baux du XVIIe siècle n’ont pas été conservés dans les archives de la Seigneurie de Lisle. Les descendants de Paul de Lisle sont protestants, certains d’entre eux vont s’exiler, en emportant leurs titres de propriété. C’est le cas de Benjamin de Lisle qui omet ses devoirs féodaux envers les Cisterciens de Fontaine-Daniel, ils le déclarent déchu de ses privilèges y compris celui de pêcher dans la Mayenne. Mais quand le Père cellérier (chargé de veiller aux biens matériels), pour affirmer les droits de l’abbaye, vient jeter son filet dans la rivière sous les fenêtres du château, il est tué. Accusé, Benjamin de L’Isle s’enfuit et quelques mois plus tard il est emprisonné puis condamné à l’exil. Il émigre avec sa femme en Hollande en 1691, laissant au Château de Lisle leurs neuf jeunes enfants dont Philippe-René de Lisle, ils sont alors élevés dans la religion catholique par un curateur.

Fin 1717, Pierre Le Vazeux âgé d’une cinquantaine d’années et sa femme Françoise Chelot renouvellent leur bail auprès du Seigneur Philippe-René de Lisle. Le notaire de Mayenne s’est déplacé au château pour l’occasion et deux témoins signent le bail : le menuisier Claude Ollivier et le cordonnier François Le Tondeux, le couple de meunier déclare ne pas savoir signer. Le bail les engage pour une durée de six ans à compter de la Saint Georges de l’année suivante (23 avril). Ils doivent payer annuellement 320 livres en deux fois : à la Toussaint et à la Saint Georges. En plus ils doivent entretenir le moulin, les bâtiments et les dépendances et fournir six chapons engraissés au carabin (sarrasin), douze poulets et six canards par an au Seigneur de Lisle. Le bail stipule qu’en cas de décès de l’un ou l’autre, le survivant devra prévenir de son départ au moins 6 mois avant, sinon il devra finir l’année en cours.
Le couple réside à Saint-Fraimbault-de-Prières depuis plus de 34 ans car de leur union sont nés dans cette paroisse : quatre garçons et six filles entre 1683 et 1698. Les registres paroissiaux de Saint-Fraimbault-de-Prières de 1716 à 1733 étant lacunaires, il n’a pas été possible de retrouver les dates de décès du couple sur cette paroisse.

Au printemps 1726, après avoir signé un bail avec le Seigneur Philippe-René de Lisle, Mathieu Galicier et Catherine Sommier s’installent au moulin de Lisle. Le couple doit verser 420 livres annuellement et le même nombre de volailles que leurs prédécesseurs, le bail est signé pour une durée de 9 ans. Mathieu Galicier a 35 ans, il est né à Oisseau où son père Jean était meunier. Il a vécut à Chantrigné avec sa première épouse Michelle Gaultier, de cette union deux fils ont survécu : Jean et Mathieu. Sa seconde femme est originaire de la paroisse de Lassay où le couple s’est marié en 1722, Renée et François voient le jour à Lassay. Lorsque la famille s’installe au moulin de Lisle, les quatre enfants sont âgés de 1 à 9 ans. Deux autres enfants, Marie et Pierre, naissent à Saint-Fraimbault-de-Prières, la famille quitte le moulin un an avant la fin du bail. En 1734, chez Jean Le Peltier fermier général des terres du fief et seigneurie de Lisle, le notaire Augustin Maret fait une subrogation de bail entre le meunier Mathieu Le Galicier et Urbain Amiard, meunier à Saint-Georges-Buttavent, aux mêmes conditions.
Urbain Amiard est né à Aron en 1676. Sa femme Marie Fourmy est née en 1688 à Saint-Fraimbault-de-Prières, le couple s’y marie le 25 novembre 1706. Il s’installe d’abord à Mayenne où vit encore la mère d’Urbain, c’est là que leur premier enfant nait : Marie, puis en 1710 le couple vit à Saint Fraimbault-de-Prières où Marie Fourmy donne naissance à un premier fils nommé Michel. Leur troisième enfant voit le jour en février 1720 à Oisseau, il porte le prénom de son père et celui de son parrain : Urbain-Etienne. Ces déplacements sont certainement liés à la profession de meunier, que Michel et Urbain-Etienne pratiqueront. Urbain Amiard décède au moulin de Lisle le 28 août 1740, âgé de 64 ans. Le lendemain, sa veuve, ses fils Michel et Urbain assistent à son inhumation au cimetière de la paroisse de Saint-Fraimbault. Suite à la disparition de son mari, Marie Fourmy continue d’occuper le moulin de Lisle et un autre meunier, François Taburet, vient s’installer à la Saint Georges de 1741, après avoir signé un bail en septembre 1740.

A suivre, les meuniers Taburet, Pacory, Lemonnier etc… Pensez à vous abonner au site ou à la page FB
Sources :
- POINTEAU Ch Abbé, Bulletin de la Commission historique et archéologique de la Mayenne, Laval, 1891, 648 pages [page 250 à 277]
- ANGOT Alphonse Abbé, Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne, tome I à II, 1900 à 1906. http://angot.lamayenne.fr/
- ANGOT Alphonse Abbé, GAUGAIN Ferdinand. Abbé, Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne, tome IV(supplément), 1909. http://angot.lamayenne.fr/
- Archives Départementales de la Mayenne https://chercher-archives.lamayenne.fr/ Série E. Etat civil de Brécé de 1672 à 1692 (E dépôt 29/E2) ; état civil de Chantrigné de 1715 à 1733 (E dépôt 39/E8, E dépôt 39/E19) ; état civil de Lassay-les-Châteaux 1721 à 1758 (E dépôt 94/E10, E dépôt 94/E11) ; état civil de Mayenne Notre-Dame 1753 (Collection communale) ; état civil de Oisseau de1680 à 1694 et 1718 à 1725 (E dépôt 127/E7, E dépôt 127/E11) ; état civil de Saint-Fraimbault-de-Prières de 1683 à 1742 (4E 252/1, 4E 252/2, E dépôt 159/E1).
- Archives Départementales de la Mayenne : Série J. Seigneurie de Lisle 140J19 ; Baux du moulin de Lisle 140J26.